jeudi 25 janvier 2018

La crise catalane

   Rien de ce qui se passe chez nos voisins espagnols n'indiffère l'aficion française. La question catalane accapare les esprits depuis plusieurs mois maintenant de l'autre côté des Pyrénées.
   Je fais partie des gens qui pensent que l'idéologie nationaliste est une de celles qui  ont le plus poussé l'humanité au crime et au malheur. Je n'ai donc de sympathie pour aucun nationalisme, fut-il espagnol ou français (les hurleurs de Marseillaise me font froid dans le dos). Quant à ces petites régions qui, comme la Catalogne espagnole, veulent péter plus haut que leur cul, si la défense de leur culture propre* me parait - à l'heure de la mondialisation à tout va - une nécessité, leur volonté de constituer un état politique indépendant relève d'une bouffonnerie pitoyable mais aussi hélas potentiellement dangereuse (pour elles-mêmes comme pour le reste de l'Europe).
   Si la confusion extrême qui prévaut aujourd'hui semble arranger tout le monde, il va bien falloir, un jour, sortir de cet imbroglio ridicule. Pour essayer d'y voir plus clair, je soumets à votre réflexion cet article de Sébastien Bauer paru dans Le Monde diplomatique de novembre 2017. Le journaliste pense que, si la cause des évènements actuels se trouve à Madrid, la solution également ...

  Sébastien Bauer, La crise catalane est née à Madrid, Le Monde diplomatique

* Dans ce domaine, les Catalans ont au moins réussi à sauver leur langue, ce que les occitans, persuadés par le jacobinisme français que la leur n'était qu'un patois de pauvres gens, n'ont pas su faire. Et ce n'est pas le choix d'appeler Occitanie (en oubliant au passage les Catalans français) une grande région française du sud qui changera les choses.






















Serafin Marin, un matador catalan dans les arènes de Madrid

samedi 13 janvier 2018

Antonio Purroy Comportement du taureau de combat 3 - questionnaire

   L'ouvrage d'Antonio Purroy (publié en 2003 en Espagne) se termine par une enquête auprès de toreros, éleveurs, critiques taurins et aficionados.
   Voici, pour alimenter nos réflexions hivernales, quelques extraits de réponses données concernant les problèmes du toro et l'évolution de la corrida.

   "Plus on recherche une charge douce et répétée, plus on réduit le taureau sauvage. Et l'on en arrive trop souvent à voir ces animaux, ni braves, ni solides, ni mobiles, ni encastados, ... ceux que l'on appelle sosos: fades, sans charge ni tonus, littéralement vidés de leurs qualités, du fait d'une sélection à l'envers."     Miguel Darrieumerlou, critique   p.251

   "Je pense qu'on recherche un taureau qui ait toutes les vertus pour permettre de faire un toreo toujours plus esthétique et, par conséquent, toujours moins profond. A ce que je crois, la Fête évoluera dans le chemin où va le taureau; j'espère que ce sera celui de l'émotion et des faenas profondes."    Manolo Vázquez, matador    p.229

   "Je ne crois pas trop à l'idée de standardisation des encastes, car, pour un même encaste, on constate des différences énormes de comportement au bout de quelques années, selon la politique de l'éleveur. Je pense en revanche qu'il serait nécessaire qu'il y ait des élevages d'État, sans but lucratif, avec des réserves génétiques diversifiées, qui puissent servir à la fois de "conservatoire" et de "laboratoire" du sang brave.
   Il y a deux discours classiques. Un certain discours torista pour lequel le taureau dégénère sans cesse, un certain discours torerista pour lequel les taureaux d'aujourd'hui sont plus braves que jamais. Tout cela relève du mythe. Ce qui est vrai, ce sont les choses suivantes : il y a de moins en moins de vrais mansos (en querencia, impossibles à piquer, banderilles noires, etc.), et d'autre part, il y a aussi de plus en plus de toros nobles (mais moins d'invalides qu'il y a quinze ou vingt ans).
   Cette double évolution est le fait de l'évolution du toreo et de sa pression sur le marché. Il y a une sorte de cercle que l'on peut résumer de la façon suivante : à chaque époque, certains grands toreros réussissent "techniquement" à faire avec les taureaux de leur présent ce que les autres toreros ne réussissent pas aussi bien : ils toréent plus près, plus immobiles, plus long, plus lié, etc. Le public les plébiscite, les autres toreros tentent de les imiter. Cette double pression (des toreros et du public) sur le marché oblige les éleveurs à faire évoluer leurs taureaux dans le sens d'une nouvelle définition de la bravoure. Des éleveurs apparaissent qui achètent dans le rameau de sang brave qui réussit le mieux à cette époque et qui tend à prendre le dessus sur les autres. Un nouveau type de taureau s'impose correspondant à cette double évolution."   Francis Wolff, aficionado   p.276

photo Laurent Bernède


vendredi 12 janvier 2018

Antonio Purroy Comportement du taureau de combat 2 - citations

eau et poids
   Le processus de rumination et la digestion ruminale exigent au moins quatre parties d'eau pour chaque partie de matière sèche alimentaire ingérée et, en guise de curiosité scientifique, il faut ajouter que le contenu digestif, composé d'une quantité d'eau élevée (plus de 80%), arrive à représenter jusqu'à 20% du poids vif de l'animal. Un taureau de cinq cents kilos peut avoir plus de quatre-vingts kilos d'eau dans son tube digestif.   (p.83)

faiblesse
   Si les vaches font preuve d'une grande noblesse mais manquent de force, on dit que c'est parce qu'elles sont maigres et on les approuve sans savoir ce qui se serait passé si elles avaient été grosses. Compte tenu de la transmission héréditaire du manque de force, on ne devrait jamais approuver une vache qui est tombée durant la tienta.   (p.126)

bravoure
   Après la première pique, il est nécessaire de remettre le taureau en suerte puisque ce n'est qu'à partir de la seconde pique qu'on pourra commencer à le classer sur des bases sérieuses. Avec une seule pique on ne peut pas voir la bravoure d'un taureau : en revanche pour la seconde il sait qu'il va avoir affaire avec le picador.
   Si malgré cela il y revient rapidement et en galopant, s'il pousse avec force, baisse la tête et s'il est difficile à séparer du cheval, il peut être considéré comme brave. S'il a le même comportement dans une troisième rencontre, c'est à dire en galopant avec envie d'attaquer et même, "se grandissant", alors on peut le considérer comme très brave.  (p. 192)

   Une caractéristique singulière et très intéressante d'un taureau authentiquement brave est que, bien qu'il se trouve dans une situation compromise (fatigué ou blessé ou les deux), son orgueil ne lui permet pas de montrer son véritable état à ses congénères dans le pâturage, au matador dans l'arène, donnant la sensation que rien ne lui arrive. Dans une telle circonstance, jusqu'à un stade bien avancé du travail de muleta, il se maintient dressé et la bouche fermée.  (p.203)

   Laissant de côté les conceptions anciennes ou modernes sur la bravoure, un taureau se définit comme brave quand il répond rapidement aux stimulations externes, mais pour cela il est nécessaire qu'il se trouve dans une situation appropriée pour attaquer, qui est généralement la séparation de ses congénères ou le manque de liberté. Bien que la charge puisse être d'abord la conséquence d'un instinct défensif ou de libération, elle devient rapidement une attaque décidée contre tout ce que le taureau considère comme une provocation.  (p.117)






lundi 8 janvier 2018

Antonio Purroy Comportement du taureau de combat


   Le Navarrais Antonio Purroy est bien connu des aficionados pour ses interventions en défense de la corrida ainsi que pour être l'organisateur, à Pampelune, des Jornadas sobre el toro de lidia y tauromaquia.
   Ce livre prend place dans la bibliothèque de l'aficionado à côté de celui écrit par Alvaro Domecq El toro bravo. Si Alvaro Domecq, en tant qu'éleveur s'attache plutôt à expliquer la conduite d'un élevage de toros en fonction des différents moments de l'année et des différents âges du bétail, ici Antonio Purroy, qui est ingénieur agronome et professeur à l'Université publique de Navarre, a pour objectif de décrire et de comprendre (autant que faire se peut) le comportement du bétail brave dans les élevages mais aussi durant son combat dans l'arène.
   Rien n'échappe aux analyses de l'auteur, aussi bien le comportement social (rapports hiérarchiques, sexualité, maternité) que physique (hygiène, nourriture) ou psychologique (bravoure, stress). Il attribue une importance particulière à cette notion de stress et c'est sans doute l'apport principal de son travail. Il semblerait que la capacité de chaque toro à s'adapter au stress pourrait être déterminante dans son comportement dans l'arène et pourrait même être une des causes de la faiblesse de pattes. Il consacre d'ailleurs un chapitre entier au manque de force. Il écarte la consanguinité comme cause de cette faiblesse, de même que l'excès de poids, mais pense que certaines gènes en relation avec la chute des toros pourraient s'être répandues dans les élevages qui n'écartent pas les vaches qui ont montré peu de force lors des tientas. D'après ses recherches et celles de ses collègues, le stress produit chez le toro lors de son entrée dans le ruedo et au début de sa lidia provoque, par réaction chimique, de graves problèmes musculaires qui peuvent expliquer l'apparition de la faiblesse de pattes. Cette faiblesse est largement aggravée chez les toros qui ont une carence nutritive en sélénium et en vitamine E, en revanche "seuls les animaux les plus braves et ayant le plus de caste seraient capable de répondre de façon adéquate à ce stress, évitant le syndrome des chutes dans une forte proportion. Il est probable que l'on éviterait un grand nombre de chutes en menant à bien une sélection génétique adéquate, en distribuant une alimentation complète, équilibrée et correspondant aux nécessités nutritionnelles de l'animal, à chaque moment de sa vie, et en établissant un programme d'entraînement physique et émotionnel qui améliorerait les conditions physiques et psychiques des toros au moment du combat. Ce qui commence à être communément accepté, c'est l'existence d'une relation directe et significative entre la perte de sauvagerie et de caste des animaux et leur manque de force".
   Un livre passionnant pour tous les aficionados (débutants aussi bien que chevronnés) et d'une utilité certaine pour les éleveurs de toros braves.

Antonio Purroy, Comportement du taureau de combat à l'élevage et dans l'arène, traduction de Marc Roumengou, Atlantica, 2014
L'édition originale en espagnol est parue en 2003, Universidad Pública de Navarra